SPITZBERG'98
Carnet de route (1)
Quelques notions de vocabulaire sont nécessaires pour comprendre la dénomination des lieux, voici donc la signification de la terminaisons de noms de lieux :
Vendredi 3 avril : Arrivée en terre artique
Après un voyage de 15 heures en avion, nous atterrissons à Longyearbyen à 3h du matin aprés avoir percé une couche de nuages bas. Il fait -10°C et nous sommes surpris du peu de neige : tout est balayé par les vents. Aprés le débarquement nous attendons l'ouverture de la compagnie d'hélicoptère, dans l'aéroport puis dehors une fois celui-ci fermé. A 9h la compagnie ouvre, mais les hélicoptères ne peuvent pas nous conduire aujourd'hui, le plafond de nuage est trop bas, et ne permettrait pas de passer le col à 500 m d'altitude que nous devons franchir pour rejoindre les bords du Austfjorden.
Trois d'entre-nous vont voir l'agence locale chargée de notre logistique : on négocie un transport en skidoo aujourd'hui même, en remplacement de l'hélicoptère, et pour le même prix. Pandant ce temps, les autres préparent les bagages : c'est le branle-bas de combat , tout doit être prêt pour le transport à 12h. On se dépèche de faire quelques dernières emplettes, et à midi nous sommes réunis autour des motoneiges, habillés pour le grand froid (doudoune + surveste + cagoule + masque).
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Ce sont donc 6 motoneiges qui vont nous conduire à notre premier camp. Assis à l'arrière, il faut bien se cramponer et suivre dans les virages sur les skidoo qui filent à 60/80 km/h. Le vent froid nous engourdis, et nous apprécions les haltes que font les conducteurs pour faire le point ou reconnaitre le terrain lorsqu'il devient accidenté. Partis de Longyearbyen, nous rejoignons Sassenfjorden par Adventdalen. Puis nous remontons Billefjorden vers le nord, en passant entre la petite ville minière de Pyramiden, et le front du grand Nordenskiolbreen. Nous "atterrisons" alors pour monter sur le Ragnarbreen. Peu aprés le col, la couverture nuageuse se dissipe, laissant apparaitre la descente vers le lac sur le Mittag-lefflerbreen ou nous allons faire notre premier camp. Le lendemain, il nous restera alors à descendre le glacier vers le Nord pour rejoindre le profond Austfjorden. Au bord du lac, nos conducteurs nous laissent après un dernier café et une dernière mise en garde envers les ours qui risquent de rôder dans le secteur.
Ca y est, les derniers skidoo disparaissent sur le glacier, et leur bruit s'estompe : nous sommes livrés à nous même, à 80 km de la civilisation. Le montage de notre premier camp se fait dans l'enthousiasme : nous n'avons pas perdu la main depuis deux ans ! Nous prenons la menace des ours au sérieux, et Denis nous fait une démonstration de tir. Nous rassemblons toute la nourriture dans nos pulkas, que nous éloignons de nos tentes. Et nous décidons de monter la garde toute la nuit, chacun à tour de rôle : cela fait 6 quart de 1h30. La nuit, un peu fraiche (-15°C) se passe sans problème et sans ours. Le vent se lève sur le matin.
Samedi 4 avril : Face au vent
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7h : L'eau est chaude, et Jean-Luc nous réveille. Le vent s'est levé, et le froid se fait sentir (-15°C). Nous nous préparons avec confiance à partir pour notre première étape malgrés le vent : direction Nord. Le départ se fait à 9h30, dans la tenue grand vent, mais sans trop se douter de ce qui nous attend. Nous devons descendre le glacier en pente douce pour rejoindre les rives de Austfjorden à 12 km. Mais aprés avoir quitté l'abri de la colline qui abritait un peu notre camp, le vent forci de plus en plus et l'enfer commence. Les ennuis s'enchainent : les peaux se décollent sous les skis à cause du froid, l'intérieur de nos masques givrent, un brancard casse. Il faut donc nous arrêter, sortir peaux et masques de rechange, ou essayer de faire tenir les peaux tant bien que mal. Les arrêts sont le plus bref possible, afin de ne pas se geler : les onglées aux doigts sont nombreuses.
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Toute la journée nous allons avancer dans le blizzard, tenant le cap à la boussole et évitant les crevasses et les séracs en les devinant. Nous ne faisons même pas d'arrêt casse-croute. Aprés un dernier passage glacé entre les crevasses, nous atteignons la grève gelée des berges du fjord (le vent chasse toute la neige). Le vent est trés violent, et nous devons nous arc-bouter pour tirer nos pulkas de 50 kg. Enfin aprés 7h d'effort pour parcourir 13 km, nous arrivons en vue de la petite cabane : des motoneiges sont garées à coté. Nous entrons, mais les norvégiens qui l'occupent ne nous disent pas un mot, nous faisant seulement comprendre qu'ils ne veulent pas être dérangés ! On va donc installer le camp dans une petite combe abritée du vent de nord dominant. Tout le monde "pelle" et monte les tentes. Une fois rassemblé sous la tente mess nous voyons les dégats : gelures au visage pour Philippe, Jeannot, Isa et Jean-Luc, plus deux phallanges de doigts pour Jean-Luc !